Je suis né en Ontario dans la ville de London, le premier jour du printemps. Soit le 20 mars 1992. La neige commençait à fondre et le printemps s’installait tranquillement. J’ai été le premier et dernier enfant de ma famille, donc je suis fils unique. Mes parents avaient essayé pendant très longtemps d’avoir un enfant, sans succès, donc ils furent très heureux de ma naissance. Ils vivaient probablement la vie la plus banale du monde entier : ma mère était pâtissière et mon père était mécanicien. Ce ne sont pas de gros métiers, mais jamais je n’ai senti que je manquais de quelque chose. Ils ont été de très bons parents et je les aimais de toutes mes forces. Très jeune, je me suis découvert une passion pour la musique : je me souviens quand j’étais encore qu’un gamin, j’entendais des chansons et je me mettais à chanter moi aussi. Mais j’étais beaucoup trop timide! Et si tout le monde se moquait de moi? C’est à l’âge de 12 ans que je me suis enfin décidé à chanter, lors d’un spectacle communautaire de la ville. Cela a été un succès et on m’a dit que je devrais réellement continuer dans cette voie. C’est exactement à ce moment là que l’envie de devenir chanteur et gagner ma vie en faisant ce que j’aimais le plus me trottait de plus en plus en tête.

15 Juillet 2005, London. J’ai 13 ans.

« En rentrant, Lucas, j’aimerais que tu range ta chambre. » Me dit ma mère.

Je roule les yeux au ciel. Elle m’énerve avec cela! Après tout c’est MA chambre et je me retrouve dans mon bordel, pourquoi est-ce que je ne peux pas faire ce que je veux? Je vais semblant ensuite d’approuver pour qu’elle cesse de me casser les pieds avec cela et tourne la tête vers la fenêtre. Nous sommes en voiture, il est tard. Mon père conduit et nous revenons de vacances à la plage. J’ai vraiment hâte de rentrer à la maison, c’est bien la plage, mais…

« CHÉRI, ATTENTI… »


25 Juillet 2005, St-Joseph’s hospital. London.

« Il se réveille, il est en vie…Lucas? Lucas, tu m’entends? »

Cette voix étrangère…j’entends les moniteurs sonner et je me sens doucement revenir à moi. Ouvrant faiblement les yeux, aveuglé par la forte lumière de ma chambre et je les referme aussitôt. Je m’efforce à les ouvrir à nouveau, la vision embrouillée qui devient plus nette à la longue. Regardant autour de moi, je me rends compte que je suis à l’hôpital. Qu’est-ce que je fais ici? Et depuis combien de temps suis-je là? Je sens mon cœur double de volume et cogner durement contre ma poitrine. Je ne vois mes parents nulle part, il n’y a que des médecins et des infirmières, je suis branché de partout et j’ai horriblement mal.

« P-papa? M-maman? » Osais-je demander, craignant la réponse. Les médecins se regardent et semblent mal à l’aise. Qu’est-ce qui se passe? J’ai peur. Un des médecins s’approche doucement de moi, pose doucement sa main sur mon épaule et me regarde, l’air désolé. « Tes parents sont morts dans l’accent de voiture que vous avez eu. Ils sont morts sur le coup, il y a de cela dix jours. Tu es le seul survivant. »

Jamais je ne ressentis une telle souffrance. À l’aube de l’adolescence, mes parents sont partis. J’ai eu plusieurs blessures physiques de cet accident dont un traumatisme crânien qui me fait encore souffrir quelques fois. J’ai souffert physiquement très longtemps de ces blessures, mais jamais rien ne m’a autant affecté que de perdre, en une seule seconde, mes deux parents. Suite à leur mort, on m’a placé en famille d’accueil. Ils n’étaient pas méchants, ils ne m’ont pas maltraité non plus. Ils étaient disons, correct. Ils faisaient le nécessaire mais je n’ai jamais été très proche d’eux. Je me suis débrouillé seul pour pas mal de trucs, et je me suis renfermé surtout dans la seule chose qui me permettait de m’évader : la musique. Je n’ai jamais cessé de chanter. Et aujourd’hui, j’ai envie d’être chanteur. C’est réellement ce que je veux faire de ma vie, je veux gagner ma vie en faisant ce qui me passionne car je sais que si mes parents seraient encore là, ils voudraient que je sois heureux et que je fasse ce que j’aime faire.

J’ai été accepté à l’université dans un programme de chant, et j’en suis fier puisque c’était difficile d’y entrer. Je me compte très chanceux, et je vais tout faire pour réussir à faire ce que je veux. Parfois je suis triste en pensant à mes parents, mais je me dis que je fais tout cela pour eux. En leur honneur, et je veux les rendre fiers tout en faisant ce que j'aime le plus au monde.