J’avais besoin d’un café, urgemment. Ces derniers jours je ne dormais que trop peu, voir pas du tout. Depuis que j’avais fait cette erreur avec Serena je n’osais plus allez dans notre chambre. Je dormais chez des « amis » ou bien je m’arrangeais pour n’aller dans la chambre que quand j’étais certain qu’elle n’y serait pas. Ce n’est pas tant que je ne voulais pas la voir, je ne voulais tout simplement pas avoir à m’expliquer, parce qu’en fait je n’avais pas d’explication à lui donner. Je venais de terminer mon cours de métrique, cours obligatoire pour les étudiants en musique, les mathématiques étaient supposés nous aider avec nos partitions… si vous me le demander, je ne vois pas très bien le lien, mais bon la vie est ainsi faite; de questionnement sans réponse. Le café le plus près de l’université ce trouvait à 3 minutes de marche, sans faire de détour je me rendit directement après la fin de ma classe. Le café était plombé de gens, personne que je connaissais, mais pleins de femmes que je mourrais de faire la connaissance. Mes yeux s’attardèrent sur une en particulier, son visage m’était familier, mais je ne pouvais pas mettre le doigt sur son identité. Il y avait une chose de certaine, je ne connaissais pas son prénom, et je me faisait une mission aujourd’hui de l’apprendre. Je commandai donc mon café, noir, comme je l’aimais, puis je marchai jusqu’à elle. Je m’assis sur la chaise en face d’elle, maintenant son contact visuel jusqu’à ce qu’elle soit la première à feindre.

« On se connaît ? » Demandais-je comme l’aurais fait quelqu’un sans grand talent de séduction. Cette fois-ci mes intentions étaient pures –pour l’instant- cette femme je l’avais déjà croisée, mais ou ?

« À l’université peut-être? Est-ce que tu étudies à Niagara Evening ? » Continuais-je en fronçant les sourcils.

« Peut-être que si tu me disais ton prénom ça m’aiderais. » Dis-je sans lui donner le mien.

Il y avait quelque chose dans son regard que je n’arrivais pas à traduire, étais-ce de la haine ou encore du dégoût ? Étais-ce aguichant ou bien séducteur ? Merde, je n’en savais rien. Je tentais de soutenir ce regard intriguant du mien que je le pouvais, mon honneur en tenait. Les hommes étaient ainsi fait, toujours là à ce donner des défis intérieurs, le mien, aujourd’hui, serait d’au moins obtenir le numéro de cette femme. Cette sublime femme. Je l’avais déjà croisé quelque part, aussi courte qu’ait été cette rencontre, elle m’avait accrochée puisque ce souvenir flou refaisait surface aujourd’hui. Je lui demandai si elle étudiait à Niagara, bien que j’étais persuadé de l’avoir croisé bien avant mon entrée à cette école; « Oui, on se connaît, j'étudie à Niagara Evening mais je ne pense pas qu'on se connaisse de là. » Elle n’avait que confirmé ma première réflexion, alors… si ce n’était pas là… alors ou ? Il y avait quelque chose dans sa voix qui me trahissait son mécontentement profond. Fuck. Il fallait absolument que j’élucide ce mystère avant qu’elle me le crache au visage. Avait-on déjà…? Non. Bien sûr que non, je m’en serais souvenue. Si ? Elle but une gorgée de son café avant de me révéler son identité; « Je m'appelle Anastasia Meyer. Je pensais que tu te souviendrais de moi, Travis, si mes souvenirs sont bons. » Travis ? Elle connaissait donc mon nom… Alors comment étais-ce possible ? Son arrogance ne faisait que me rendre encore plus nerveux. Se blanc total commençait vraiment à m’énerver ! Mais, merde ! Anastasia… Anastasia ? Ce n’est pourtant pas un nom commun… Meyer ? Est-ce que je connais un autre Meyer ? Non pas que je sache, ah si peut-être. Meyer… For fuck sake ! Tout ce qui me revient c’est Mike Meyer et je doute qu’elle soit reliée à ce putain de chat dans le chapeau.

« Désolé je ne vois pas. » Elle me regardait encore de ses yeux perçants et semi meurtrier, ce qui eut le don de m’énerver un peu plus. « Pourquoi tu ne me le dirais pas toi, ça nous éviterais à tous les deux le mal de tête ! » En observant bien son visage, quelques traits me revenaient, mais en conclusion tout ce que je pouvais dire c’est qu’elle était un peu trop belle pour un seul homme.

Elle but une gorgée de son café, sous mon regard toujours aussi insistant. Pourquoi n’y allait-elle tout simplement pas avec la vérité ? La vérité n’avait jamais tué personne, et c’était toujours mieux d’y aller avec ça. Direct et claire, voilà ce que je lui demandais d’être. Sans même avoir à verbaliser ma volonté elle s’exécuta, croisant les bras, plongeant son regard océan dans le mien elle déclara; « T’as sauté ma mère, connard. » Simple, court et précis. Je fronçai les sourcils un instant.

« Impossible ! » Dis-je haut et fort. Je remontai dans mon esprit, passant en revue une à une les femmes qui avaient visitées mon lit. Même la perspective de l’avoir fait me donnait des nausées, Anastasia semblait avoir le même âge approximatif que moi, alors comment aurais-je pu me faire une nana du double de son âge… sans même m’en souvenir ? Meyer, Meyer ? Encore ce foutue nom qui me hante.

« Comment t’as dit que ta mère s’appelait déjà ? » Oh mais peut-être… peut-être étais-ce elle ? Ce souvenir remontait à si loin qu’il ne pouvait qu’être flou à mon esprit. Mais ce qui m’intriguais le plus c’est comment elle, elle le savait ? Comment pouvait-elle savoir que j’avais couché avec sa mère ? Mes pensées revinrent à nouveau sur ce doute, étais-ce bien celle à qui je pensais ? Ma première fois ? Bon sang, si c’était elle… si c’était elle Anastasia aurait alors toutes les raisons du monde de m’en vouloir… Je regardai derrière moi, question de juger de la distance qui me séparait encore de la sortie. Un bon deux à trois mètres seraient mon échappatoire.

« Si ta mère est bien celle à qui je pense alors… ça fait un bon sept ans que ça se serait produit. Tu ne crois pas qu’on pourrait faire une trêve, ne serais-ce que pour aujourd’hui ? » Demandais-je en lui offrant un de mes sourires sarcastiques, c’était mon moyen à moi de lui demander d’être indulgente et surtout de ne pas frapper trop fort. J’avais les pieds en amont, j’étais près à déguerpir à l’instant même si la suite des choses me l’obligeait.

HJ; Franchement, comment pourrais-je?

Madame n’était visiblement pas contente. « MEYER. » Me lâcha-t-elle sur un ton si sec qu’il m’en laissa quelque peu perplexe. Mon regard s’arrêta immédiatement sur la porte, elle serait mon échappatoire si jamais miss devenait violente. Les images remontèrent une à une à ma mémoire. Sa mère prenait bien les années, soit elle avait eu recours à un scalpel, soit elle flinguait tout son argent dans des crèmes collagèniques inabordables. En fait, ce n’est qu’après coup que j’appris que cette femme était mère de famille. Nos conversations avaient été assez brève, je n’avais cependant pas hésité une seconde à la suivre le soir ou elle m’avait proposé de la suivre jusqu’à chez elle. Un jeune homme en post-puberté me comprendrait sans difficulté. Anastasia ne comprendrait jamais. Je lui proposai un contrat à l’amiable. Une trève. « Une trève ? Oh, mais bien sur mon mignon ... » Le sourire qui accompagna son discours suffit pour me convaincre qu’elle n’était que sarcastique. Elle but jusqu’à la dernière goutte de son café avant de me ré adresser la parole.« C'est bon je vais pas te bouffer. T'es pas comestible. Mais je suis de nature rancunière alors je l'aurai toujours en travers de la gorge. » C’est toujours bien de le savoir, elle n’était donc pas une cannibale en manque de chaire. Elle réussit à m’arracher un sourire, un rire aurait été de trop. Je relaxai enfin, je reposai la plante de mon pied sur le sol, je n’avais plus l’intention de partir maintenant.

« Pour ma défense, j’étais jeune, sous l’effet d’atténuant et ta mère avait la rhétorique facile. Comment aurais-je pu résister? » Je l’observai encore plus intensément qu’ordinaire, je cherchais les ressemblances entre la mère et la fille. Bien que j’eus du mal à me figurer la portrait maternelle, une chose était certaine;

« Et puis, on doit te l’avoir dit mille fois déjà, mais tu as hérité d’une chose c’est certain. De sa beauté énigmatique. » Ses yeux, ses cheveux, sa bouche surtout, tout me revenait maintenant. Je me levai finalement, je n’avais plus rien à faire dans ce café, j’en avais même oublié la raison de ma venue.

« Bon, aurevoir sinon adieu Anastasia M.E.Y.E.R. » J’articulai bien son nom, question de l’imiter. Je m’avançai vers la sortie, sans jamais me retourner.